The Boys : quand les super-héros sont des salauds [critique]

22 août 2019 0 Par Kihaa

Depuis fin juillet, The Boys est sur toutes les lèvres. Mais quelle est donc cette série ? Pour faire simple, The Boys est l’adaptation du comics éponyme de Garth Enni, comics qui dépeint des super-héros violents, immoraux et antipathiques. La série est produite par Amazon (donc une exclusivité Prime Video) sous la houlette d’Eric Kripke, Seth Rogen et Evan Goldberg. La première saison est sortie le 26 juillet 2019 et affiche un charmant 18+. Dans The Boys, les supers sont rassemblés sous la bannière des Sept (The Seven) et travaillent pour la société Vought. Derrière le marketing et les faux-semblants, de simples mortels vont se dresser contre l’injustice. A l’heure où les Avengers explosent le box-office, le traitement au vitriol des super-héros s’avère-t-il payant ?

 

The Boys : du cash au trash

Le premier épisode de The Boys commence fort : Hughie Campbell, un jeune vendeur vivant encore chez son père, assiste choqué à la mort de sa petite copine. Et quelle mort ! La pauvre est percutée en pleine rue par A-Train, « l’homme » le plus rapide du monde et membre éminent des Sept.  Cette scène magistrale combine hémoglobine, ralenti et bande-son anxiogène. Elle survient dans les six premières minutes de la série, gravant violemment son ADN dans la rétine des spectateurs. Comme si ce drame ne suffisait pas, Hughie est confronté au cynisme de la société : l’entreprise Vought qui gère les Sept envoie un avocat pour lui proposer de l’argent, à condition de ne plus jamais évoquer cette affaire. Son propre père s’inquiète davantage de la somme qui pourrait être refusée que des émotions de son fils.

C’est dans ce contexte désespéré que Billy Butcher, porté par Karl Urban (Xena, Le Seigneur des Anneaux, Dredd), entraine Hughie dans une véritable vendetta. Billy rassemble alors le Français, la Crème et Hughie pour former une équipe, The Boys, dont le but sera de faire tomber les Sept. Justice et vengeance s’entrecroisent et s’emmêlent, poussant les victimes à devenir elles-mêmes des bourreaux. Hughie, profondément naïf et étranger à la barbarie, prendra un certain nombre de claques morales et idéologiques. La violence n’est pas uniquement visuelle et physique : le langage cru, les vérités fracassantes et le pragmatisme de certains individus sont autant de formes qu’elle peut prendre.  The Boys utilise la satire pour déconstruire les idées préconçues, les croyances et égratigner les valeurs hypocrites.

En parallèle, le spectateur suit la venue d’Annie alias Starlight (Stella) dans le cercle très fermé des Sept. A l’instar de Hughie, elle ne sera pas épargnée et ce, dès le premier épisode. Abus, violences verbales, chantages, la petite blonde qui se rêvait justicière va découvrir à ses dépens que tout à un prix.  

 

Le costume ne fait pas le héros

A l’origine, le comics The Boys était publié par une filiale DC avant d’être tout bonnement annulé car  la critique des super-héros s’avérait dérangeante. Et pour cause, Les Sept ne sont que le miroir peu flatteur de la Justice League. Ainsi, l’équipe est composée du Protecteur (Antony Starr), Reine Maeve (Dominique McElligott), d’A-Train (Jessie T. Usher), de l’homme-poisson (The Deep en anglais, porté par Chace Crawford), Black Noir (non ce n’est pas une mauvaise traduction, c’est bien son nom en anglais) et Translucide (Alex Hassell). Starlight (Erin Moriarty) est la dernière à les rejoindre suite au départ de La Torche. Ils évoquent respectivement Superman, Wonder Woman Flash, Aquaman, Batman  et J’onn J’onzz grâce à leurs pouvoirs et codes vestimentaires. A leur tête, on trouve la business woman Madelyn Stillwell, vice-présidente de Vought.

Si les supers font écho à DC, ils s’en démarquent néanmoins par leur personnalité. Contrairement au comics éponyme, la série The Boys propose un peu plus de consistance pour leurs bad guys en costume. En effet, ces derniers ont beaucoup plus de nuances et sont sujets à des dilemmes moraux. Ils sont à bien des égards ancrés dans la réalité. Rassurez-vous cependant, le show d’Amazon n’aseptise pas leurs vices et leurs méfaits. Bien au contraire. Drogue, alcool, tendances psychotiques, meurtres, agressions sexuelles…. Les Sept ne sont pas des tendres. Mention spéciale à Antony Starr / le Protecteur : sourires suscitant le malaise, regard glaçant et mimiques faciales impressionnantes. Il crève tout simplement l’écran !

Reine Maeve est peut-être la seule qui inspire un peu de sympathie dans ce tourbillon d’égoïsme et lutte de pouvoir. Starlight est dès le début à part, puisqu’elle rejoint le groupe en cours. Elle suit un cheminement parallèle à celui d’Hughie en voyant tous ses rêves et espoirs brisés un par à un. Attachante et déterminée, Starlight est sans doute celle qui représente le plus l’archétype du héros tel qu’on le connaît et qu’on le chérit.

 

God Bless America

Starlight c’est aussi cette jeune fille éduquée selon les valeurs chrétiennes américaines. Vous savez, « Dieu n’est qu’amour »… Enfin, sauf si vous êtes homosexuels, que vous couchez avant le mariage et que vous ne parlez pas comme une prude ! Outre l’aspect très contradictoire de la religion et de son « faites ce que je dis mais pas ce que je fais », The Boys souligne aussi son marketing qui n’a rien de sain, à l’occasion de son « expo de l’espérance » : concert avec une star, gourou avec un discours très rodé, des rencontres VIP surfacturées et des stands un peu partout.

The Boys n’épargne personne dans sa critique. Si les adorateurs sans recul sont torpillés, il en va de même pour ceux qui tirent les ficelles de cette immense farce.  L’omniprésence de l’argent, fer de lance du self-made man, est d’ailleurs largement pointée du doigt. Vought, la multinationale derrière les Sept, organise l’emploi du temps de ses supers, leurs discours et leurs actions uniquement pour faire des bénéfices. On retrouve de ce fait une surutilisation des sondages auprès de l’opinion pour tout et n’importe quoi (comme un costume), des produits dérivés absolument partout, des films et des séries à la pelle… Ce n’est pas sans rappeler notre époque avec du Marvel qui se trouve à chaque coin de rue, de pub et dont les super-héros inondent le cinéma et le petit écran.

Derrière les Sept et leur immunité, c’est tout le système Hollywoodien qui est remis en cause. Ces super-héros qui tiennent un rôle devant le public, se font passer pour ce qu’ils ne sont pas et profitent de leur notoriété pour être épargnés par la justice. Cette fameuse justice à deux vitesses, qui condamne monsieur et madame tout le monde mais ne s’attaque jamais aux célébrités. La dame à la balance n’a jamais été aussi bien illustrée qu’avec le bandeau qu’elle a sur les yeux. Toujours dans cette dynamique de « starisation » propre aux américains, l’entourage de Starlight représente aussi ces familles qui instrumentalisent un enfant pour s’enrichir, se construire une situation sociale et ce, en dépit du bien-être du bambin.

Enfin, la politique américaine, par l’intermédiaire du Congrès, en prend largement pour son grade. Manipulations, chantages, lobby de l’armement, votes achetés… C’est d’ailleurs Madelyn Stillwell qui sera à la manœuvre pour faire voter une loi décisive. Une façon de rappeler que les lois ne sont pas faites pour répondre à des causes nationales et internationales mais pour arranger les puissants.

L’avis d’Arya

The Boys, se situe entre la critique des super-héros que l’on connait, et un univers où les supers sont des gens au-dessus des lois qui peuvent être autant adulés que craints. Difficile de ne pas se sentir happé par la série quand dès le premier épisode on se retrouve sous le choc d’une mort bien violente et sanglante. Il est certain que les héros dépeints dans la majorité des bandes dessinées sont certainement trop parfaits… Et que si Monsieur Lambda devenait un super, il utiliserait certainement ses pouvoirs pour son propre intérêt. Reine Maeve et Starlight sont certainement les seuls super pour qui j’éprouve de la sympathie. Je ressens un mélange de dégoût et de pitié pour le Protecteur,  on ne peut donc que saluer la prestation de l’acteur qui joue à la perfection son rôle. Si vous aimez les histoires un peu trash, des super-héros plus humains que parfaits, vous êtes clairement au bon endroit. La série est en plus assez courte… De quoi profiter d’une excellente série terminée en 3 soirées. Emballé, c’est pesé !

L’avis de Joey

Une série qui m’intriguait, comme ça en passant, mais pour laquelle je n’avais pas nécessairement de trop grandes attentes. Pour autant que je sache, il s’agissait d’une série satirique sympatoche et hop, on en parle plus. Pourtant, l’intrigue a su très rapidement me captiver, et j’ai été bien agréablement surpris de voir des personnages aussi complexes, qui vont bien au-delà de la caricature. The Boys a beau paraître inutilement trash et potentiellement immature, vu de l’extérieur… Il suffit pourtant de se plonger dedans le temps de quelques épisodes pour se rendre compte que la série sait parfaitement ce qu’elle fait. Et alors, qu’est-ce qu’elle le fait bien !

L’avis d’Aronnax

Courte série coup de poing d’Amazon Prime, The Boys réussit d’emblée à captiver le spectateur grâce à sa réadaptation originale du genre super-héroïque. L’œuvre démystifie la figure du super-héros dans un univers – par ailleurs très semblable au nôtre – où le mercantilisme et les faux-semblants font loi. Cette série polémique ne s’attaque pas seulement aux super-héros, mais aussi aux dérives de la starification, du lobbying, de la privatisation de l’autorité dite « publique », ou encore de la religion. Réservée à un public mature, la série vous envoûtera rapidement, bien qu’une baisse de régime soit constatée en fin de saison due à un traitement inégal du rythme de l’action. Néanmoins, The Boys atteint avec brio ses objectifs initiaux et conclut d’une bien belle manière la saison 1. Vivement la suite !

L’avis final de Kihaa

The Boys  bouscule les règles et fusille la sacrosainte image que nous avons des super-héros. Si elle n’est pas la seule œuvre visuelle à prendre ce parti pris, elle s’illustre néanmoins par son cynisme et sa brutalité. Forte de ses 8 épisodes d’une heure en moyenne, la série distille une montée en puissance qui se clôture par un final explosif. En faisant le choix de donner une vraie profondeur aux Sept, l’adaptation d’Amazon accentue la violence en la rendant bien plus réelle et communicative. Pourquoi les super-héros feraient-ils systématiquement le bien ? The Boys dépasse le manichéisme des comics (super-héros/super-vilains) pour proposer une image des super-héros plus en phase avec la condition humaine, faite d’abus. La réalisation, les effets spéciaux et le casting sont aux petits oignons. Une fois que vous avez lancé le pilote, vous ne pouvez plus vous arrêter !

 

Note
  • 9/10
    Casting - 9/10
  • 9/10
    Intrigue - 9/10
  • 8/10
    Originalité - 8/10
  • 9/10
    Format - 9/10
8.8/10

Résumé

Avec The Boys, vous découvrirez les super-héros comme vous ne les avez jamais vus. Violence, sexe et manipulation vous attendent !