Retour en Force #1 – Devil May Cry [Chronique]
15 mars 2019Retour en Force, c’est l’occasion de se pencher sur les séries vidéoludiques qui ont pu, l’espace d’un ou plusieurs épisodes, s’égarer plus ou moins du droit chemin, avant de trouver la rédemption avec un retour fracassant. Et pour accompagner la sortie de Devil May Cry 5, pourquoi pas nous attaquer à une période de cette saga démonique, pour inaugurer cette rubrique ?
Devil May Cry, bien que proposant des épisodes majoritairement bien reçus, n’est pas exempt de moutons noirs. Et si le doigt pourrait être pointé par certains joueurs sur le reboot de 2013 par Ninja Theory, DmC: Devil May Cry, mettant en scène un Dante qui était loin de faire l’unanimité, force est de constater que le jeu en lui-même reste un minimum solide.
Certes l’écriture est certainement dans le bas du panier dans la famille DMC, et la technicité du gameplay en prend un petit coup après un Devil May Cry 4 et son système de combat très difficile, mais d’autant plus gratifiant, à maitriser complètement. Reste que DmC: Devil May Cry demeure un bon jeu, qu’on daigne ou non l’accueillir comme un véritable membre de la famille.
Non, le cas qui nous intéressera ici, aura eu lieu quelques années avant tout ça. Devil May Cry premier du nom a connu son gros succès auprès des joueurs. C’était donc sans trop de surprise qu’une suite verrait le jour, tôt ou tard. Et ce qui devait arriver arriva. Simplement pas de la manière dont on pouvait l’espérer…
Devil May Cry 2: L’enfer commence
Premier point noir, Hideki Kamiya (Resident Evil 2, Okami, Bayonetta) n’était plus aux commandes de Devil May Cry 2. Pire… Lui qui aurait pourtant voulu travailler sur une suite des aventures de Dante, n’avait même pas été consulté par Capcom. Lui et son équipe ont dû donc découvrir après coup que leur bébé aurait un petit frère. Mais qu’ils n’en seraient plus les parents. De quoi l’avoir mauvaise, à n’en pas douter. Mais bon, quand bien même les développeurs seraient différents, il serait toujours possible que cela puisse être bénéfique pour le projet. Un œil neuf pourrait potentiellement insuffler une vision neuve, et ainsi éviter la redite.
Ce qui nous amène au deuxième point noir. Le jeu diffère effectivement du premier opus. Mais alors dans toutes les pires directions imaginables. Ainsi les décors artistiquement torturés et mémorables laissent place à une succession de bâtisses fades et monochromes, avec de longues rues désertes où aucun vécu ne transparait. La caméra s’éloigne pour qu’on ne puisse même plus vraiment profiter de l’action.
Les différentes armes au gameplay propre à chacune, ainsi que les techniques à débloquer disparaissent au profit de plusieurs épées de différents gabarits qui se jouent toutes exactement pareilles, sans aucune possibilité d’étoffer son moveset. Et pour couronner le tout, Dante, qui avait marqué tout le monde avec son caractère impétueux, devient ici totalement sérieux, en retrait et à la limite de la dépression. Son humour profitant de tous ces changements pour se faire la malle (si on fait l’impasse sur le coup de la pièce, sa nouvelle lubie dans cet épisode).
Quand bien même Devil May Cry 2 n’est pas le pire jeu du monde, on n’ira pas jusque-là quand même, il est véritablement bien difficile de ne pas être immensément déçu en sortant du premier volet. La majorité des qualités ont déguerpi, ne laissant plus qu’un jeu tout à fait jouable, même agréable parfois, notamment grâce à une fluidité de mouvements accrue par rapport à l’original.
Évidemment, les bons points existent, mais il reste assez effarant de voir un tel plongeon en terme de qualité. Et la difficulté à d’ailleurs suivi l’allure. Le challenge punitif mais juste et gratifiant du premier n’est plus. Dans DMC 2, on peut se contenter de laisser son doigt appuyé sur le bouton dédié aux armes à feu. Et une bonne poignée de minutes plus tard, l’ennemi, voire le boss qui vous faisait face, trépassera sans vous procurer la moindre fierté ou excitation.
Pire qu’un jeu qui ose de choses en se cassant la gueule, Devil May Cry 2 est fade et ennuyeux. Le nombre de moments excitants (du moins au premier abord, avant que l’illusion ne se brise) peut se compter sur les doigts d’une main. Pourtant, les bonnes idées existent bel et bien. Il devait donc sûrement y avoir un minimum d’envie de bien faire de la part de l’équipe. A moins que toutes les meilleures choses ne se soient greffé au jeu sur la fin du développement ? Allez savoir… Car oui, si la direction du jeu est officiellement attribuée à Hideaki Itsuno (Power Stone, Dragon’s Dogma…), ce dernier n’a été mis à la tête du projet que sur les 5 derniers mois de développement. De quoi faire un peu tache sur un CV. Mais heureusement pour monsieur Itsuno, ce dernier aura vite prouvé qu’il était bel et bien capable de mieux, puisque c’est également lui qu’on retrouvera à la tête de l’épisode suivant, Devil May Cry 3 : Dante’s Awakening.
Devil May Cry 3 : Les portes du paradis s’ouvrent
Et autant dire qu’après la honte que pouvait être DMC2 à la série, Devil May Cry 3 lui, saura vite s’imposer comme l’un des indispensables de la série. Peut-être est-ce l’échec (plus critique que commercial visiblement) du précédent qui a poussé Hideaki Itsuno et son équipe à se donner à fond. Mais alors là, il y a quand même de quoi être bluffé. Parce que non seulement DMC3 redresse la barre après le second, mais il est même parvenu avec les années, à s’assurer le titre de meilleur Devil May Cry auprès de nombreux joueurs. Et quel que soit le vôtre, de favori, voire ce 3e volet s’offrir et consolider un tel statut, il y a de quoi forcer le respect.
Tout ce qui avait fait les belles heures du premier DMC sont de retour en force (ha!), et plus si affinités. Parmi les nouveautés, divers styles de combat que Dante pourra choisir en début de mission, ou en cours si vous rencontrez une des statues récurrentes, qui vous permettait déjà de faire vos petites emplettes avant. Ces styles vous permettront de privilégier l’aspect des combats qui vous sied le mieux, entre les attaques corps à corps, l’utilisation de vos armes à feu, ou encore votre agilité.
Et cette nouvelle profondeur de gameplay ne sera pas inutilement jetée aux ordures puisque les boss sont à nouveau agressifs et travaillés, avec une vraie personnalité, et n’hésiteront pas à vous pousser dans vos retranchements avec une difficulté plus brutale que jamais.
Même sur le plan scénaristique, aspect qui n’a pourtant jamais été LE point fort de la série, Devil May Cry 3 : Dante’s Awakening propose sans doute l’histoire la plus abouti de la série. Une double intrigue familiale qui s’entremêle, en introduisant des personnages ou en en étoffant d’autres à peine survolés précédemment, en asseyant leur statut de personnages iconiques récurrents.
DMC 3 parvient également à servir son histoire par le gameplay, en présentant, lors des scènes cinématiques, les menaces et challenges à venir (notamment le frère et rival de Dante, Vergil). Challenges grandissants qui seront par la suite parfaitement retranscrits par des combats de boss, qui attendront de vous une maîtrise du jeu et des réflexes toujours plus grands.
Devil May Cry 4 aura ensuite su perfectionner certains éléments préalablement solidifiés par ce 3e volet, avec notamment le gameplay en tête de liste. Mais c’est bien DMC3 qui demeure cependant l’épisode qui aura su offrir la meilleure balance entre tous ses différents aspects. S’il n’est pas l’épisode ultime en tout point, il réussit tout ce qu’il entreprend de manière solide et maitrisée. Suffisamment pour pouvoir prétendre au titre de meilleur représentant de la série.
Impressionnant rattrapage que ce Devil May Cry 3. Et qu’importe les raisons qui ont fait de Devil May Cry 2 ce qu’il est, ce qui est fait est fait. Et plutôt que de se morfondre sur ce qu’aurait pu être DMC2, réjouissons-plus plutôt de comment les choses ont tourné. Qui sait à quoi ressemblerait la série aujourd’hui si le développement de DMC2 n’avait pas été si catastrophique au point de nécessiter un changement de direction. DMC n’est peut-être pas une série irréprochable, mais au vu de sa composition aujourd’hui, disons qu’on aura pu tomber bien plus mal. Plus de positif que de négatif à relever. Et ne serait-ce que pour l’existence de DMC3, on ne peut pas être trop rancunier envers DMC2.